Réveil difficile | Léonara & Déicide

Ma petite ambiance sonore pour le message:

La première fois qu'elle put voir à nouveau, Modwen fut aveuglée par la lumière. Pourtant, il faisait nuit et les rayons de lune n'éclairaient que faiblement la pièce via l'unique lucarne à barreau de la pièce. Sa cellule était plutôt spacieuse et confortable, tout du moins pour une cellule de prison. La miraculée pouvait profiter d'un vrai lit et d'une porte pleine, lui assurant une certaine intimité, bien qu'elle n'en ait eu nul besoin jusqu'à maintenant puisqu'elle était plongée dans une profonde stase. Bien que désormais capable de voir son environnement direct, Modwen n'était pas encore en état de réellement comprendre ce qu'elle voyait. Après une durée difficile à définir, le sommeil la gagna à nouveau.


Le lendemain, elle reprit conscience alors qu'une employée de la prison la lavait avec un gant et une bassine d'eau froide. Ce fut le contact de l'eau sur sa peau et la différence de température qui la sorti de sa léthargie. Incapable pour l'heure du moindre mouvement ou du moindre son, son cerveau engourdi essayait avant tout de comprendre de nouveau ces sensations qu'il avait oubliées. Au bout de quelques instants, la voix de l'employée lui parvint et Modwen se rappela que les sons existaient. Dès lors, elle fut de nouveau réceptive au clapotis de l'eau dans la bassine. Elle ne comprenait pas encore les mots qui étaient prononcés, mais le ton rassurant de cette voix et sa douceur l’apaisait. Avant qu'elle ne s'en rende compte, elle était de nouveau seule mais la sensation de fraîcheur sur sa peau perdura jusqu'à ce qu'elle sombre à nouveau dans l'inconscience.


Ce fut une odeur qui la tira de son sommeil la troisième fois, était-on le même jour, le lendemain, plusieurs jours plus tard ? Impossible pour Modwen de le savoir, ni même d'avoir réellement conscience du temps qui passait. Son esprit retrouvait petit à petit ses repères dans le monde et, cette fois, en plus de sa vue, de son ouïe et de son touché, son odorat s'était à son tour sorti de sa léthargie. La pièce sentait légèrement le renfermé, sans doute à cause du manque d'aération et, même si cela était très diffus, le simple fait de sentir à nouveau quelque chose submergea totalement la jeune femme tant qu'elle en toussota légèrement. Cela n'avait l'air de rien, mais il s'agissait là du premier son s'extirpant de sa gorge depuis plus d'un an maintenant.

Son réveil suivant fut un peu plus brutal, ses yeux s'ouvrir en grand et une légère panique l'envahit. Son corps semblait s'être rappelé qu'il avait besoin d'eau pour vivre et la sensation de soif lui sembla terrible, presque insurmontable. Puissant dans les faibles forces que son corps semblait redécouvrir, elle tourna la tête pour découvrir réellement la pièce autour d'elle. En plus du lit, il y avait une petite table de chevet sur laquelle était posé un bol et une cruche en grès. Les deux étaient remplis d'eau et Modwen tendit ses bras maigrelets vers eux afin d'essayer de s'en saisir. Le résultat ne fut pas très probant et le bol finit renversé, répandant le précieux liquide sur les pierres du sol. Modwen elle-même avait glissé du lit et s'était écroulé à moitié hors de celui-ci. Ses bras avaient heurtés le sol et une nouvelle sensation se répandit dans son être, une de celles qu'elle aurait bien voulu oublier à tout jamais : la douleur.


Il lui fut impossible de savoir combien de temps elle resta ainsi, peut-être s'était-elle assoupie dans cette position. Mais on vint finalement la remettre dans le lit et l'aider à boire. Elle n'était pas encore en mesure de comprendre ce que lui disait la femme qui avait accouru à son chevet, mais il était clair qu'elle lui posait des questions. Alors, Modwen s'efforça de comprendre ce qu'on attendait d'elle. Cela ne fut pas un grand succès et la femme était déjà repartie avant même que Modwen n'ait eu le temps de capter le moindre mot. Elle finit cependant par revenir, avec une nouvelle cruche d'eau et un bol de bouillon. Deux autres personnes l'accompagnaient, sans doute curieux de voir de leur propre yeux si celle belle au bois dormant s'était vraiment éveillée. Quelques mots lui parvenaient, quelques bribes de phrases. On examina ses bras, on lui fit boire à nouveau et, quand il sembla qu'elle n'était plus capable d'avaler, on reposa le bol de bouillon à peine entamé sur la table tout près d'elle. Bien que tout fut encore très désordonné dans son esprit, il lui sembla que les personnes autour d'elle s'inquiétait de savoir ce qui lui était arrivé, si elle ne s'était pas fait mal en tombant du lit ou si elle avait besoin de quoi que ce soit. Modwen prit une lente inspiration. Cependant, le temps qu'elle parvienne à articuler son premier mot, elle était de nouveau seule.


"Merci..."


Cet unique mot raisonna dans son esprit quelques longues minutes. Entendre à nouveau le fond de sa voix la plongea dans un état difficile à décrire. Il lui sembla qu'une foule de souvenir tentait de se bousculer dans son esprit tous en même temps mais qu'aucun ne parvenait réellement à s'imposer à elle. Seule une sensation diffuse et mélancolique d'inachevé lui parvenait, sans qu'elle puisse pour autant la comprendre.


Plus tard dans la journée, la porte de la salle s'ouvrit à nouveau. Impossible pour Modwen d'affirmer s'il s'agissait d'une des personnes déjà présentes un peu plus tôt ou non. Entre temps, elle avait réussi à manger un peu plus, sans provoquer de nouvel accident, et s'était même entraînée à murmurer quelques mots. L'employée qui entra pour lui apporter le dîner fut donc accueillie par un timide, mais néanmoins audible "Bonjour.", comme un texte bien répété. Passé la surprise initiale, la personne ainsi accueillie se rendit bien vite compte qu'il était encore trop tôt pour instaurer une vraie discussion avec la demoiselle alitée. Cependant, cette fois-ci Modwen parvenait à suivre le rythme de leur échange, répondant d'un signe de tête ou d'un sourire lorsqu'on lui demanda si elle avait faim ou soif, elle articula péniblement quelques mots, mais il ne faisait pas de doutes qu'elle serait bientôt en mesure de communiquer à nouveau avec ce monde qui l'avait oubliée.